6 décembre 2011:  déjà plus de 4000 (dont plusieurs centaines d'enfants) victimes d'une terrible répression.
A tous les syriens, quelle que soit leur obédience religieuse, qui m'ont accueilli à Damas, Sednaya, Maaloula, Alep, Hama, Palmyre et tant d'autres lieux, je veux dire ma tristesse et mon souhait le plus vif que ces massacres s'arrêtent enfin, et que ce pays si riche, de culture et de coeur, vive librement dans la paix et le respect de tous, qu'ils soient croyants ou non-croyants.

13 septembre 2012: combien de morts désormais 25.000, 30.000, beaucoup plus encore? combien d'enfants torturés, de familles enterrées vives sous les décombres de leurs maisons bombardées?
25 juin 2014: plus de 100.000 morts, à la barbarie du pouvoir s'est ajoutée celle qui s'appuie sur l'obscurantisme religieux de DAECH.
Le cataclysme gagne peu à peu tout le Proche et le Moyen-Orient...

14 septembre 2016: plus de 300000 morts, le dictateur Poutine et l'armée russe, les miliciens du hezbollah libanais, sont aux côtés du pouvoir syrien contre les rebelles et les kurdes, les occidentaux sont plus ou moins du côté des rebelles et des kurdes contre DAECH mais pas officiellement sur le terrain, les turcs combattent un peu DAECH et surtout les kurdes, Téhéran aide Damas et l'Irak n'a pas encore récupéré tous les territoires pris par DAECH. 
Les attentats revendiqués par DAECH se multiplient en Europe et aussi en Afrique et en Asie. 

25 décembre 2016 Alep, reprise par les assassins liés au pouvoir, est un champ de ruines et plus particulièrement les quartiers est tenus jusqu'au bout par les rebelles.
J'ai tellement aimé Alep et l'accueil de ses habitants... je suis très triste.
Trump, le futur président américain, Fillon possible futur président français, Mélenchon tribun d'une certaine gauche française affirment leurs convergences avec Poutine, pendant que les européens, dont en premier les français, mégotent leur accueil aux réfugiés.
En même temps, à la frontière sud de la Syrie, les israéliens ne cessent de réduire et de morceler l'espace vital des palestiniens, affirmant clairement leur mépris pour les résolutions de l'ONU et leur volonté d'éradiquer la présence palestinienne.

 

dimanche 5
Lyon-Damas
lundi 6
Damas
mardi 7
Bosra, Chahba, Sednaya
mercredi 8
Sednaya, Maaloula, Krak des Chevaliers
jeudi 9
Amrit, Tartus, Ougarit, Lattaquié
vendredi 10
Château de Saladin, Slunfeh, Apamée, Hama
samedi 11
Hama, Art(village bédouin)
dimanche 12
Art, bédouins cueilleurs de pistache, villes mortes, Alep
lundi 13
Alep
mardi 14
Alep, Saint-Siméon
mercredi 15
Sergiopolis(Rasafeh), lac Assad, Halabiyeh, Deir es Zor
jeudi 16
Deir es Zor, Palmyre
vendredi 17
Palmyre
samedi 18
Palmyre, Bagdad Café, Marmoussa, Damas
dimanche 19
Damas
lundi 20
Damas-Lyon



Le groupe

Organisation du voyage

Transports locaux

Hygiène/Santé

Nourriture/Boissons

Documentation



Pour la première fois, je viens de participer à  un voyage organisé en groupe. C'est l'enthousiasme d'une amie ayant utilisé plusieurs fois les services de l'association lyonnaise ARVEL qui m'a décidé; je ne peux que me louer de l'avoir fait, tant pour la richesse culturelle rencontrée sur place, que pour les réelles possibilités de contact avec l'habitant, ainsi que pour l'organisation dans laquelle l'équipe technique -animatrice ARVEL, guide syrien et chauffeur du car, syrien également- ont été plus qu'à  la hauteur.
La Syrie est un immense musée, dont les richesses s'étalent sur 6 millénaires, et probablement bien plus. Mais c'est un musée vivant, c'est ainsi qu'on parle encore araméen dans la région de Maaloula. Vue de France, la Syrie m'apparaissait comme un désert avec quelques maigres zones de verdure; de fait le croissant fertile est très impressionnant; toutefois, à  terme se posera de façon cruciale la question de l'insuffisance de l'approvisionnement et de l'épuisement des réserves d'eau. Autre point remarquable et qui m'a agréablement surpris, l'accueil et l'ouverture d'esprit des syriens rencontrés.

Remarque concernant les noms transcrits de l'arabe: les transcriptions peuvent présenter des variations avec des différences fort importantes, même sur des documents officiels comme les cartes fournies par le Ministère du Tourisme. D'une part les versions arabes peuvent varier, et d'autre part selon que la transcription aura été faite par un francophone ou par un anglophone, le résultat pourra être différent. Par exemple le "ch" français devient "sh" en anglais, et de même le "ou" devient "u". En conséquence, si vous cherchez à  localiser un nom sur une carte, ou dans un lexique, faites un petit effort, merci...



dimanche 5: Lyon-Damas

Rendez-vous à  l'aéroport Lyon-St Exupéry à  14h; en retard d'un 1/4 d'heure, je suis le dernier, l'animatrice, Catie, n'a aucune peine à  me repérer. Nous embarquons comme prévu sur un boeing de Turkish Air Lines. J'ai un hublot dont je ne profiterai pas beaucoup à  cause des nuages. Vol sans histoire, jusqu'à  Istanbul, où nous rejoignent 5 participants venus directement de Paris. L'ambiance se ressent un peu de l'attaque commise le matin même par l'aviation israélienne contre des camps palestiniens dans le sud de la Syrie, mais se traduit uniquement par le désir de certains participants, ou d'autres voyageurs du même vol, de rassurer les familles. D'Istanbul, nous repartons pour Damas où nous attendent notre guide  Mansour, et notre chauffeur Tony.
Comme prévu, il n'est pas loin de 1h du matin, lorsqu'après avoir changé une partie de nos devises, et parcouru une vingtaine de kilomètres , nous arrivons à  l'hôtel Afamia dans le centre moderne de Damas.

 Pour une raison que je n'ai pas bien comprise, il se trouve, que nous sommes 15 participants plus l'animatrice, donc 16, qu'il n'y a, et qu'il n'y aura durant tout le voyage, que 8 chambres réservées, que si les participantes non en couple sont en nombre pair, je suis le seul homme seul; conclusion l'animatrice propose que nous partagions la même chambre, ce qui paraît logique et tout à  fait acceptable à  priori. J'apprendrai par la suite qu'une ou plusieurs personnes ont fait remarquer à  Catie que cette situation pouvait être gênante pour moi: j'avoue ne pas avoir cherché à  savoir qui faisait preuve d'autant de sollicitude à  mon égard... La suite du voyage a montré que c'est une bonne solution qui avait été adoptée, la cohabitation ayant été on ne peut plus facile.

lundi 6: Damas

La nuit a été courte, l'hôtel quoique bien situé dans le centre-ville, est voisin de la grande poste de Damas, et donne sur l'impasse où se rendent les véhicules de service de la dite Poste. Le petit déjeuner comme dans tous les hôtels par la suite, est copieux avec oeufs durs, fromage, confiture et pain local, beurre, thé et café.

Nous partons en direction du centre historique. Premier incident dans le groupe, l'une des participantes glisse sur une bordure de trottoir, et s'ouvre légèrement une arcade sourcilière dans la chute. Immédiatement un commerçant, qui a vu la scène, fait entrer notre collègue dans son magasin, et propose son aide. C'est la première manifestation de la prévenance syrienne, et ce ne sera pas la dernière.
L'affaire se termine dans une pharmacie, et nous arrivons à  l'entrée du souk Al-Hammadyyia, à  côté de la citadelle, qui est fermée au public. Notre guide, Mansour commence à  nous montrer aussi bien les khans -caravansérails- que les échoppes susceptibles de nous intéresser -le fameux glacier Bekdach aux glaces aux saveurs étranges, par exemple-. Parmi les surprises, une devanture du souk propose, dans la même vitrine un étalage de robes de soirées aux décolletés généreux et une série de bustes emmitouflés dans cette sorte de coiffe-foulard qui ne laisse voir que l'ovale du visage.
A proximité de l'entrée des touristes de la mosquée des Omeyades, nous sortons du souk en traversant les restes assez imposants d'un temple romain du 3ème siècle, dédié à  Jupiter.

  Nous nous dirigeons tranquillement vers le palais Azem, l'un des lieux de calme au milieu des souks très animés. Relativement récent -18ème siècle.- , ce palais est  représentatif de l'architecture damascénienne de l'époque ottomane, avec son très bel ensemble de bâtiments et patios. Le palais abrite un musée des Arts Populaires et des Traditions.

En sortant du palais, Mansour, notre guide, nous fait faire connaissance avec ce qui sera le plus souvent notre source -très appréciée- de nourriture pour le repas de la mi-journée: les fours; ce sont des boutiques où sont préparés, et cuits au four, friands fourrés au fromage, à  la viande ou aux épinards, petites pizzas aux herbes ou au fromage, et d'autres gourmandises salées aux prix très modiques pour nos bourses. Nous allons ensuite nous installer au café An-Nafura, café typique où l'on peut grignoter ce que l'on a apporté, boire thé et café, et éventuellement fumer le narguilé; ambiance locale garantie avec la proximité des souks et de la mosquée des Omeyades.

Après un peu de temps libre passé à  flâner dans les souks, nous nous retrouvons devant l'entrée de la mosquée destinée aux touristes. Nous pénétrons au milieu de restes du temple de Jupiter, dont nous avions vu d'autres vestiges le matin. En premier nous visitons le mausolée de Saladin (Salah ad-Din) dont la première construction date de la fin du 12ème S. mais ne présente pas un très grand  intérêt pour les non-musulmans.
Par contre la mosquée est remarquable, tant par ses 3 minarets et sa cour avec la mosaïque de la façade, la fontaine des ablutions -voir photo-, et le dôme du trésor, que par son architecture et sa décoration intérieure.
 
Le lien entre les religions monothéistes, en particulier entre christianisme et islam est ici évidente, puisque l'un des minarets est dit minaret de Jésus, et un mausolée censé contenir les restes de saint Jean-Baptiste occupe le centre de l'intérieur, tout près du riche mirhab. Une autre manifestation de ce lien se trouve à  Seidnayya, une trentaine de km au nord de Damas; une chapelle du couvent grec orthodoxe renferme une icône représentant la Vierge Marie, que viennent prier les femmes musulmanes pour avoir un enfant. Les relations entre les différentes obédiences de l'islam  -sunnites, chiites, druzes...- et du christianisme -plusieurs rites catholiques et plusieurs rites orthodoxes- sont remarquables d'ouverture aux autres. Probablement est-ce un peu moins vrai chez les chiites, mais ce n'est qu'une impression , due entre autres à  l'impossibilité de rentrer dans une mosquée chiite très connue du sud de Damas, Sayyida Zenab -cf. journée suivante-.

En sortant de la mosquée notre guide nous fait traverser le quartier chrétien, où nous visitons successivement un atelier de marqueterie, où nous découvrons les procédés semi-industriels de fabrication des revêtements de marqueterie, et la chapelle Hanania, qui est de fait une très ancienne crypte où des fresques content l'histoire de Hanania, disciple du Christ.

Notre guide nous quitte pour la fin de l'après-midi; plus ou moins ensemble nous revenons vers les souks par la rue Droite, la Via Recta de l'époque gréco-romaine. Tout le long de cette avenue et à  proximité se trouvent de nombreux centres d'intérêt, arc romain, maisons anciennes, khans...

La journée se termine par notre premier arak et notre premier dîner syrien pris dans le parc très agréable d'un restaurant non loin de l'hôtel, premier contact avec les mezze et les grillades que nous retrouverons toujours avec plaisir tout au long du voyage.

mardi 7: Bosra, Chahba, Seydnaya

Réveil matinal par les véhicules des services postaux. Il fait beau; il fera beau pendant tout le voyage, seuls quelques nuages viendront un peu voiler le ciel, pendant la 2ème semaine , en particulier à  Palmyre, le premier jour.
Aujourd'hui aura lieu notre unique incursion au sud de Damas, à  quelques dizaines de km de la Jordanie et d'Israël. A propos d'Israël, apparemment, le bombardement de l'avant-veille, sur les camps palestiniens non loin du plateau du Golan, semble avoir affolé beaucoup plus nos amis et familles en France, que les syriens. Toutefois, c'est assez souvent, durant le voyage, que nous croiserons des convois des forces syriennes, ou que nous longerons des terrains militaires.

Après le petit-déjeuner, notre car nous conduit directement à  Bosra. La banlieue et le  sud de la capitale donne une grande impression de pauvreté, que nous avons peu retrouvé à  ce degré par la suite, même si le facteur accoutumance a dû jouer un peu dans mes appréciations. Il semble que dans cette partie se trouvaient quantité de vergers et de jardins, comme on peut encore en voir entre Damas et l'aéroport, mais l'urbanisation sauvage de quartiers populaires, fait qu'il n'en reste pas grand-chose.

Bosra était connue dès le le 2ème millénaire. av. JC; elle aurait été, selon notre guide, un temps, au 1er S et avant Petra en Jordanie, capitale des nabatéens, avant d'être une importante ville de garnison romaine, puis une grande cité byzantine.

Le Bosra moderne, s'est construit sur et avec les restes de la vieille cité, et nombre de familles vivent dans ces vestiges. Les ruines sont vraiment imposantes. Elles concernent toutes les périodes de l'histoire de Bosra. Au fil des destructions/reconstructions, les matériaux ont été réutilisés.
Le joyau est évidemment le théâtre antique du 2ème S. Il est très impressionnant  par son volume, et par son état de conservation.

En quittant Bosra nous nous dirigeons vers Chahba; aux environs de Suweida, notre guide nous fait visiter un lieu de production d'arak, l'alcool anisé local équivalent de l'ouzo grec. Devant les bâtiments, des dizaines de remorques et leurs tracteurs, attendent pour livrer la récolte, des raisins blancs aux grains énormes. Nous sommes conduits dans un grand hall où sont installées les colonnes de distillation, et la visite se termine par une dégustation de ces très bons raisins. Voyager à  cette époque nous permet de goûter raisins, figues, melons, dattes, de boire du jus de grenades fraîchement pressées, un régal.

A propos de l'arak et de la consommation d'alcool en Syrie, on a pu observer une très grande tolérance de la part des musulmans, dont certains figurent probablement parmi les clients des boutiques d'alcool tenues par les chrétiens, souvent des arméniens.

A Chahba nous allons acheter notre repas de midi au four du lieu; une pâtisserie nous donne l'occasion de faire connaissance avec les douceurs locales, dont les délicieux petits gâteaux aux pistaches. Nous mangeons sur le pouce, devant l'entrée du musée de mosaïques, où nous voyons ensuite de de belles pièces du 4ème S.

Nous reprenons notre petit car pour remonter vers Damas, et nous arrêter au passage pour visiter la mosquée chiite de Sayyada Zenab, construite avec l'aide des iraniens. Environnement et ambiance diffèrent complètement de ceux des mosquées sunnites. Les mosquées chiites, comme celles de l'Iran, sont beaucoup plus décorées, très colorées. Par contre, les règles de visite sont très strictes, les femmes  doivent porter le tchador y compris pour rester dans la cour, et aucun d'entre nous n'est autorisé à  pénétrer dans la mosquée proprement dite. A l'intérieur de la mosquée se trouve le mausolée de Sayyada Zenab, petite-fille du prophète Mahomet.

  Nous nous dirigeons enfin vers Sednaya où, dans un couvent catholique syrien très moderne, nous allons trouver couvert et gîte. Le lieu domine la ville de façon très agréable; c'est un centre d'accueil pour séminaires et rencontres diverses.

Avant le repas nous sommes invités chez le propriétaire de l'agence Sednaya qui s'occupe de tous les aspects proprement matériels du voyage: réservations dans les hôtels et transport. L'accueil familial est chaleureux. Un petit incident, interne au groupe des participants,vient toutefois ternir un peu ce moment agréable; un membre proteste bruyamment contre le projet d'aller passer une prochaine nuit chez des bédouins sédentarisés; finalement tout se calme, mais ce ce n'est qu'un avant-goût de plusieurs esclandres du même ordre, notre collègue ayant toujours l'impression -à  tort chaque fois- d'être lésé dans ses droits, d'être pris pour un "blaireau" selon son expression imagée.

Retour à  notre lieu d'hébergement. Les chambres sont très confortables, et le repas, pris sur place, très copieux, comme toujours, et bon, pour un prix modique.

mercredi 8: Seydnaya, Maaloula, Krak des Chevaliers

Notre couvent-hôtel a été assez récemment construit sur un site occupé depuis très longtemps par les chrétiens. On peut voir, proches des nouveaux bâtiments une église très ancienne, et des grottes aménagées, dans lesquelles vécurent ces chrétiens.

A Seydnaya, visite du couvent grec orthodoxe de Notre-Dame, plusieurs fois reconstruit depuis le 6ème ES. Une chapelle contient une icône, représentant la vierge Marie, qui aurait été peinte par Saint Luc. Cette icône "miraculeuse" est vénérée non seulement par les chrétiens, mais aussi par les femmes musulmanes qui désirent un enfant.

L'étape suivante nous conduit, plus au N, dans les contreforts de l'Anti-Liban, à  Maaloula , qui, beaucoup plus que Seydnaya, mérite un détour.
A Maaloula, et dans les environs, est encore parlé l'araméen, survivant moderne de la langue qu'est censé avoir utilisée Jésus.
Le ville, construite en gradins à  l'assaut des falaises qui l'enserrent, comporte un grand nombre de maisons colorées très originalement en bleu. En cas de forte chaleur, il est préférable de monter avec un véhicule jusqu'au monastère de Saint Serge qui domine la ville, et de redescendre ensuite à  pied par des gorges. Ce monastère contient une église, de Saint-Serge & Saint-Bacchus dont certaines parties datent du 3ème S. Un élément remarquable est un autel circulaire, soit d'origine païenne, soit réalisé en imitation des autels de temples préchrétiens, avec une rigole, à  sa périphérie, devant permettre l'écoulement du sang des sacrifices.
La redescente sur la ville, à  pied, se fait par des gorges impressionnantes, malheureusement "décorées" par de nombreux graffitis, souvent en russe. Dans la ville, au pied des falaises se trouve le couvent Ste Thécla, laquelle aurait été une des premiers martyrs chrétiens.
Nous prenons notre repas de la mi-journée, dans l'unique et agréable petit café-restaurant sur la place au pied de l'escalier qui conduit au couvent.

De Maaloula, nous redescendons en direction du Nord, vers la vallée de l'Orontes, que nous abandonnons ensuite pour monter au Krak des Chevaliers. Nous nous rendons directement à  cette forteresse du début du 11ème S. remarquable à  la fois par l'ensemble de sa structure avec une double ceinture de murailles et de tours, et par son état de conservation.
Aussi bien les différentes salles, des chevaliers, des soldats, que la  chapelle et les écuries sont encore en bon état, et les bains conservent de beaux vestiges.
Deux jeunes adolescents nous accompagnent, et au moment où Mansour nous montre le lieu où les chevaliers de la Table Ronde avaient leur table, les deux jeunes entonnent en français la chanson à  boire bien connue...
 
Dans la chapelle nous avons une bonne surprise. Les deux jeunes ne sont pas avec nous sans motif; notre guide les avait fait appeler pour un concert improvisé. L'un des deux a une très belle voix, et nous avons droit a un très bel appel à  la prière musulman, puis à  des cantiques chrétiens chantés avec son collègue.

Notre gîte du jour est un hôtel proche du château; toutes nos chambres donnent sur lui et l'immense et beau paysage qui l'entoure. Avant le repas, l'arak bu dans le hall de l'hôtel, est l'occasion pour notre chauffeur Tony de montrer ses talents de percussionniste et, par la même occasion, de créer une ambiance festive; presque tous les soirs, ce sera le même rituel, Tony sort son darbouka, commence à  jouer, à  chanter, souvent avec notre guide Mansour, les syriens présents viennent les rejoindre, ils chantent, dansent, entraînant une partie de notre groupe.

Nous nous rendons dans un restaurant du village, pour le repas du soir et quoique nous soyons en pays musulman -plus exactement, en pays druze-,  nous goûtons à  notre premier vin syrien. Le nom  du restaurant fait référence à  la Table Ronde des Chevaliers du Krak.
A propos d'alcool, nous avons toujours pu consommer de l'alcool dans les restaurants tenus par des chrétiens, parfois dans des restaurants tenus par des musulmans; nous avons bu tous les soirs de l'arak, soit dans l'établissement où nous nous trouvions pour manger et/ou pour dormir, soit dehors, dans la campagne. La bière locale ou étrangère (Liban) est disponible dans beaucoup de restaurants, y compris tenus par des musulmans.
Nouvelle surprise, il y a un mariage dans le village et nous sommes invités à  nous rendre à  la fête, au pied des remparts du château. Au début seuls les hommes dansent, mais peu à  peu hommes et femmes, pour commencer très nettement séparés, se mêlent; l'accueil de la population est chaleureux, et plusieurs des femmes de notre groupe sont invitées à prendre part aux danses.
L'hôtel est confortable, nous passons une très bonne nuit.
 

jeudi 9: Amrit, Tartus, Ougarit, Lattaquié

   La journée d'aujourd'hui va être consacrée à  la visite de sites de l'ancienne Phénicie. Notre première halte est pour Amrit, qui semble avoir été un centre religieux. Ne sont visibles que deux meghazils du 6ème S. av JC et les restes d'un temple. Les meghazils sont des tombeaux, dont la partie utile est une salle enterrée, dans laquelle on peut encore voir les loculli destinés à  recevoir les morts; cette salle est surmontée en surface d'une sorte de tour d'une dizaine de mètres de haut, à  la base de laquelle des lions ornent les quatre coins.
A un km environ des tombeaux se trouvent des vestiges d'un temple construit au milieu d'un grand bassin carré d'une centaine de mètres de côté, probablement lié à  la présence de sources.
Non loin de ces ruines, on peu voir les traces des gradins d'un stade antique.

D'Amrit, nous filons vers Tartus, l'un des 2 ports de mer de la Syrie, avec Lattaquié. Nous nous promenons dans les vieilles rues de la citadelle, et achetons dans un four et chez un marchand de fruits ce qui sera notre repas de midi que nous allons manger, en hauteur, sur la terrasse d'un café, sous les murailles du Qal'aat al Marqab, forteresse dominant la côte et construite avec des pierres volcaniques noires.

Nous redescendons vers le bord de mer, au nord de Lattaquié, où quelques membres du groupe se baignent, et comme à  plusieurs reprises durant ce voyage, nous buvons le thé que nous a préparé notre chauffeur.

Comme souvent, notre guide a choisi de nous faire visiter en fin d'après-midi le site d'Ougarit, pour que nous puissions profiter d'un bel éclairage, et que nous n'ayons pas à  souffrir du soleil du "deuxième été" encore très fort.
On sait qu'Ougarit était connue dans le monde antique au moins dès le 3ème millénaire av JC. Seule une partie de la surface, et dans cette partie seules les couches supérieures, ont été fouillées. Des recherches en profondeur, très localisées, ont trouvé des parties remontant au 8ème millénaire. Ces restes dont les parties visibles ont parfois plus de 4 millénaires sont remarquables, tant la demeure royale que les temples, et d'une façon générale, l'urbanisme de la cité.

  Quoique notre guide Mansour soit lui-même un puits de connaissances, nous avons la chance de rencontrer sur place un archéologue français travaillant sur le site. Ougarit est une mine d'or pour les chercheurs qui, de temps en temps, font des découvertes majeures comme la maison de l'individu nommé Rapanou; dans cette maison quantité de tablettes comportant des textes utilisant les écritures hiéroglyphiques (Egypte) et cunéiforme (Mésopotamie) en même temps que l'alphabet d'Ougarit ont été trouvées; cet alphabet d'Ougarit est donné comme le premier alphabet connu, et les syriens le présentent comme l'alphabet origine de tous les autres, ce qui, selon les archéologues rencontrés, n'est pas du tout évident.

 

Il faut noter que nous sommes proches de la mer que nous apercevons vers l'ouest. Toutefois, il nous a  été bien recommandé de ne pas chercher à  aller vers le bord, il y a là  un terrain militaire interdit.

C'est vers Lattaquié que nous rejoignons la rive, pour un apéritif et un dîner dans un petit restaurant, où les tables sont installées sur le sable à  deux pas de l'eau. Le hasard veut que les archéologues rencontrés sur le site d'Ougarit viennent également prendre leur repas ici, nous les invitons avec nous, et comme j'ai la chance d'être assis à  côté d'eux, je peux bénéficier de leurs connaissances.

Ce soir je fais l'expérience du narghileh, et j'avoue que c'est fort agréable; je recommencerai lors d'autres soirées. Contrairement à  ce qu'on peut entendre parfois, le contenu du fourneau du narguilé n'est que du tabac, éventuellement parfumé, avec de la pomme par exemple.

Tony nous conduit à  Lattaquié, à  l'hôtel Al Nour, correct sans plus, mais tout à  fait dans l'ambiance de notre voyage.

vendredi 10: Château de Saladin, Slunfeh, Apamée, Hama

De nouveau, nous roulons dans la montagne pour rejoindre le Qala'at Salahiddin que les francophones connaissent sous le nom de château de Saladin. Cette forteresse a été érigée dans un région de moyenne montagne couverte de forêts. Une chose m'a frappé depuis que nous sommes au nord de Damas, c'est la végétation, qu'elle soit due à  l'agriculture, ou naturelle comme ici. L'appellation croissant fertile, qui concerne entre autres les vallées de l'Orontes et de l'Euphrate, est bien méritée.

Ce sont les byzantins, qui, au 10ème siècle entreprirent de construire cette étape fortifiée entre Lattaquié et Alep. En 1188, Salah ad Din s'empara de la place après un bref siège de 2 jours. Le site est très beau et l'accès d'abord par une petite route dans la forêt, puis à  pied par un chemin dans les pins, est très agréable. Les bâtiments sont soit récemment restaurés, soit en train de l'être.

Après avoir bu le thé dans une des salles, nous allons rejoindre notre car pour nous rendre à  Slunfeh pour le repas de midi.

Slunfeh est un lieu de villégiature très recherché par les nantis du pays, ainsi que de toute la péninsule arabique. Il est vrai que la fraîcheur de l'altitude, et des forêts, en font un lieu de refuge idéal pendant les très fortes chaleurs de l'été; en cette mi-octobre, nous l'apprécions également. La majeure partie du groupe choisit de prendre son repas dans un des petits restaurants de la rue principale. Repas désormais sans surprise avec ses mezzés et ses grillades, mais toujours aussi bon et peu cher -pour nous-.

  Le programme de l'après-midi nous permet de parcourir une belle route de montagne pour rejoindre la vallée de l'Orontes, puis de traverser cette plaine, où nous apercevons... un troupeau de buffles. Nous voyons également de grandes plantations de coton dont c'est l'époque de la récolte; nous croisons de nombreux petits camions disparaissant presque sous les énormes sacs de la récolte.

  

  
Nous arrivons sur le site antique d'Apamée, un des moments majeurs de ce voyage. Le soleil est déjà  un peu bas, la lumière est très belle, le Cardo, immense avenue de 2 km, s'étend devant nous, bordée de centaines de colonnes, parfois encore surmontées de fronton.
Une restauration importante nous permet de nous faire idée de ce que pouvait être cette ville d'environ 500.000 habitants (esclaves inclus) à  l'époque de sa prospérité, et fondée au 3ème S. av JC. On dit que plusieurs centaines d'éléphants de combat y étaient gardés, nourris par les riches pâturages de la vallée de l'Orontes.
Des éléments originaux parsèment les restes de la cité, comme des colonnes torsadées.
Le parcours du site est également l'occasion de voir un scorpion de belle taille au milieu des ruines, ce sera le seul animal venimeux que nous aurons eu l'occasion de rencontrer.

Notre hôtel, Cairo, est dans le centre de Hama, toujours dans le même style, simple mais accueillant. Mansour nous propose un restaurant au bord de la rivière. En arrivant, nous constatons que non seulement nous mangeons au bord de l'eau, mais de plus ce qui fait l'orgueil de Hama est là : quatre norias bien mises en valeur, ainsi que l'aqueduc qui en part. Le restaurant des "Quatre Norias" où nous mangeons, propose une spécialité à  base de poulet et de riz, bonne mais un peu "étouffe-chrétien". Il est vrai que depuis notre arrivée, tous les repas du soir ont été copieux et notre appétit s'en ressent.  Nous parcourons à  pied les 1500m qui nous séparent de l'hôtel.

samedi 11: Hama, Art village bédouin

Ce matin nous avons quartier libre. Naturellement, il y aurait des édifices et des musées à  visiter, mais je préfère profiter de cette liberté pour flâner. Je commence par me rendre près des norias du centre. Ces norias dont certaines atteignent au moins une dizaine de mètres de haut, peuvent avoir plusieurs siècles d'existence. la ville étant en partie à  flanc des collines qui bordent la rivière, elles permettaient grâce à  des aqueducs d'alimenter en eau les quartiers hauts. Actuellement, les seules que j'ai vues en service, ou susceptibles de l'être, semblent destinées à  l'arrosage des jardins non loin de l'eau.
La rivière faisant des méandres, il est souvent possible d'observer plusieurs norias à  la fois; elles sont encore au nombre de 17 réparties sur toute la traversée de la ville.
Je remonte le cours d'eau par sa rive gauche, ce qui me conduit dans le bas de la vieille ville, où un groupe de jeunes sortant d'un institut palestinien vient parler avec moi; ils sont palestiniens eux-mêmes. Comme chaque fois, le fait d'être français favorise nettement les contacts, même si les jeunes rencontrés parlent mieux l'anglais, en général, que le français.

Par les petites rues, je poursuis mon chemin en suivant au plus près la rivière, c'est ainsi que je passe à  côté du palais Azem et de la mosquée An-Nouri. En continuant au plus près de l'eau, je viens longer le pied de la citadelle; dans le parc qui borde la rivière je croise un petit troupeau de chèvres guidé par un adolescent qui en même temps révise ses cours. Les chèvres présentent la particularité d'avoir des oreilles très longues, un peu comme celles des chiens cockers; plus tard au cours du voyage, il m'arrivera d'en revoir ainsi que des brebis présentant elles aussi ces mêmes très longues oreilles.

Prochaine étape, la noria Al Mohammediyya, qui date du 14ème S. qui alimentait la Grande Mosquée, c'est la plus grande de toute, et il est possible d'observer de très près le bel assemblage de centaines de pièces de bois. De l'autre côté de l'eau, je suis alerté par le bruit que font des ouvriers qui sont en train de terminer une noria, de dimensions plus modeste que sa voisine, mais dont le bois neuf ressort au milieu de la verdure luxuriante de la rive. Il s'agit probablement d'une restauration, l'aqueduc qui en part semblant  plutôt ancien.

Je remonte jusqu'à  la grande mosquée dont j'espérais voir l'intérieur, mais je ne parviens pas à  entrer. je passe ensuite par le quartier chrétien, où se succèdent les boutiques vendant de l'alcool, impossible à  trouver, en principe, dans le reste de la ville. Mes pas me ramènent vers le centre, d'où je remonte sur les souks; ces souks ne sont pas particulièrement attrayants, mais comme toujours l'animation est très vive. De là , comme il est midi je reviens à  l'hôtel où je retrouve quelques collègues avec lesquels je vais acheter quelques bricoles pour le repas. De fait, je n'achète que des fruits, de très beaux et délicieux raisins, ressentant le besoin de limiter ma nourriture, les repas du soirs étant toujours très/trop copieux.

Après avoir mangé dans le hall de l'hôtel, il est temps de repartir avec le car. C'est alors qu'un des membres du groupe s'aperçoit qu'il a oublié un petit sac quelque part dans sa promenade matinale; il repart en courant et nous le rejoignons, avec le car en haut de la citadelle; le sac, avec appareil et rouleaux de pellicules exposées entre autres n'est pas retrouvé.

C'est ce soir que nous devons être hébergé chez des bédouins sédentarisés, une cinquantaine de kilomètres à  l'est de Hama.  Mansour doit nous apprendre à  faire le taboulé, et par ailleurs nous devons apporter toutes les provisions pour le repas du soir et le petit déjeuner, les ressources sur place étant plus que limitées.
En cours de route nous nous arrêtons donc à  Salamiyeh, où, ici plus qu'ailleurs, on peut remarquer ces triporteurs enjolivés et peints de mille couleurs; certains même ont une sorte de carrosserie récupérée sur des voitures datant visiblement de plus d'un demi-siècle. car en Syrie, il y a apparemment une vraie passion pour les vieilles voitures, particulièrement pour les grosses américaines des années  50-60, les Buick, Chevrolet et autres Cadillac. On a même pu apercevoir une "Traction-Avant 15-6" de Citroën et quelques DS ou ID de la même marque.

  Peu à  peu nous nous rapprochons d'Art, le village qui doit nous accueillir, et déjà  nous apercevons les constructions étranges des "villages ruches". Dans les débuts de la sédentarisation des bédouins, ces derniers construisaient sur des soubassements de pierre, des suites de pièces en briques de terre, au toit conique.

Dès l'arrivée dans le village, nous sommes chaleureusement accueillis. Les bédouins sont musulmans sunnites, le village ne fait pas exception, et les femmes, la tête couverte, mais le visage  découvert, sont un peu en retrait. Nous logerons dans deux pièces recouvertes de tapis et de coussins, et c'est dans l'une d'elles que nous prendrons nos repas.
Nous nous promenons un peu à  l'intérieur et à  l'extérieur du village, dont le nombre d'habitants est difficile à  estimer, mais les familles doivent être une dizaine. Les anciennes maisons en terre ne paraissent plus être utilisées pour le logement, et certaines sont en ruines. dans la cour de la maison où nous logeons, poussent de nombreuses fleurs qui pour la plupart sont très gourmandes en eau. En général les immenses étendues actuellement dépourvues de  toute verdure, sont consacrées à  la culture de l'orge, mais comme partout des forages ont été effectués, et on peut voir des plantations irriguées de coton, d'aubergines, et de tournesol.

Il ne serait pas bien vu que nous buvions des boissons alcoolisées dans le village, et avec le car nous nous éloignons dans les collines des environs, jusqu'à  un point de vue d'où nous pourrons profiter du coucher du soleil. Une fois encore, Tony sort son darbouka, pour chants et danses qui inévitablement attirent les conducteurs des rares voitures qui passent sur la route toute proche. c'est l'occasion de faire connaissance avec le chef de de la famille chez qui nous logeons. Au sujet de l'accueil au village des groupes comme le nôtre, notre guide mentionne, que c'est chaque fois une famille différente, pour que toutes puissent bénéficier un jour où l'autre de l'apport que représentons les visiteurs.

  Nous rentrons au village où il est temps de préparer le repas, et plus particulièrement le taboulé. Il est temps de dire ici que le taboulé que l'on mange en France , à  l'exception des restaurants syriens et libanais, n'a rien à  voir avec l'original du proche-orient. Les proportions de persil et de semoule sont totalement inversées, il faut même faire un effort pour apercevoir les graines de semoule cachées sous une montagne de persil, et d'un peu de menthe également. Ici la quantité de persil prévue pour une vingtaine de personnes est impressionnante, il nous faut couper menu le contenu de 4 grands sachets de supermarché. Peu à  peu notre guide, notre animatrice, quelques  membres du groupe se mettent tour à  tour au travail, car il n'y a qu'un couteau, et alors que je viens juste de commencer, une des femmes de la famille d'accueil vient activer les choses en terminant elle-même. Pendant ce temps, des fils de notre hôte sont venus nous tenir compagnie. C'est enfin le moment du repas où, naturellement nous faisons honneur au taboulé, ainsi qu'à  un plat de poulet et de légumes préparé par les bédouins.

Les deux images ci-dessus illustrent bien la position de la femme en pays musulman. Chez les chrétiens arabes, ne serait-ce qu'au  vu de vêtements n'ayant rien à  envier aux vêtements de leurs soeurs européennes, les femmes semblent être soumises à  moins de contraintes. C'est en tout cas ce que nous avions pu constater, chez le directeur de l'agence qui nous avait reçu à  Sednaya, en présence de sa femme et de sa fille, grande  adolescente; c'est également visible dans la rue.
 
La soirée se continue en buvant thé et café, et en discutant à  l'aide de Mansour avec nos hôtes.
Des matelas sont apportés dans les deux pièces où nous allons dormir, ainsi que d'épaisses couvertures. Ayant prévu une telle soirée, j'ai avec moi un "sac à  viande", dont ce sera la seule utilisation pendant le voyage.

dimanche 12: Art, bédouins cueilleurs de pistache, villes mortes, Alep



 La nuit a été sans problèmes et nous avons bien supporté les épaisses couvertures, la température extérieure ayant été relativement basse à  cette altitude d'environ 400 mètres. Après avoir mis de l'ordre dans la pièce, nous prenons le petit déjeuner habituel, mais évidemment assis directement sur les tapis.

Avant de reprendre la route, nous allons visiter l'école primaire, dont un des fils de notre hôte est instituteur. Quoique le contraire nous soit affirmé, il est évident que tous les enfants du village ne vont pas à  l'école, alors que beaucoup d'autres du même âge sont présents. Autre constatation, il n'y a environ qu' 1 fille sur 3 élèves, la proportion diminuant avec l'âge; mais l'accueil est une fois encore très sympathique.


En remontant vers le nord, en direction de la région des
"villes mortes", notre guide fait arrêter notre car au milieu d'immenses plantations de pistachiers.
C'est l'occasion de voir des pistaches mûres, dans leur surprenante coque rose, sur leurs arbres.
On nous explique que la cueillette se fait lorsqu'on peut entendre le bruit que font les coquilles en s'ouvrant naturellement.
Les bédouins que nous rencontrons viennent ici le temps de la cueillette; ils nous reçoivent dans la construction sommaire qui leur tient lieu d'habitation tant que dure ce travail.
Thé et pistaches fraîches nous sont offerts. La jeune femme qui est présente accepte très volontiers d'être photographiée .

  
A propos des photos, nous n'avons jamais eu le moindre problème; il est vrai qu'en ce qui me concerne j'ai toujours demandé l'autorisation, et que je n'ai pas fait les photos de femmes que j'aurais aimé prendre, n'ayant pas osé demander de peur de les voir poser. Tout au plus , en ai-je "volé" quelques unes de très loin, grâce à  un zoom assez puissant. La femme bédouine rencontrée dans cette famille, semblait beaucoup plus libre d'allure que celles du village  où nous avions passé la nuit.

A propos du keffieh, la coiffure des bédouins,, il est normalement rouge, mais noir pour indiquer un deuil et blanc pour marquer une occasion qui sort de l'ordinaire. La sorte d'épais lacet noir dont 2 tours maintiennent le voile sur la tête est habituellement réservé aux hommes d'un certain rang, comme les chefs de familles.

En quittant les bédouins, nous nous rendons à  Ma'arat an Nu'aman, pour y visiter le musée de mosaïques byzantines, qui comme nous le fait remarquer notre guide, sont beaucoup moins riches que les mosaïques de l'époque romaine vues à  Shabba. mais il y a de nombreuses et très grandes pièces. Un aspect intéressant de la visite est que le musée a été installé dans un khan, dont la minuscule mosquée est un petit bijou; cette mosquée est normalement fermée mais grâce à  notre guide nous avons le privilège de pouvoir rapidement y jeter un coup d'oeil.

Ma'arat an Nu'aman est un exemple de la sauvagerie avec laquelle les croisés ont pu se conduire au 11ème S. Les chroniqueurs chrétiens de l'époque rapportent, non seulement le massacre de toute la population mais aussi des cas d'assassinats d'enfants et de cannibalisme horribles.


  Une fois n'est pas coutume, nous prenons notre repas de midi dans un restoroute de l'axe Damas-Alep; rien à  voir avec nos restoroutes européens, le cadre est agréable, le personnel, avenant, la nourriture bonne et les prix très raisonnables.

  La fin de l'après-midi est consacrée à  la visite de 2 de ces "villes mortes", datant de l'époque byzantine, et abandonnées non détruites, il y a 1500 ans; ces cités désertées sont nombreuses dans les environs d'Alep. Nous nous attardons surtout à  Serjillia, dont les ruines remarquablement conservées donnent une très riche idée de l'architecture et de l'urbanisme dans cette région qui a l'époque était l'arrière-pays d'Antioche -à  une trentaine de km à  vol d'oiseau, mais en territoire turc-.


Je profite d'une petite demi-heure de temps libre pour sortir du périmètre de la ville. Au milieu de friches se trouve ce qui est probablement un tombeau; l'ensemble de l'édifice, y compris le toit en dalles est dans un bon état de conservation.

Nous passons ensuite à  Al Bara où nous attardons principalement autour de tombeaux pyramidaux qui contiennent encore de beaux sarcophages.

La fin de la journée nous voit arriver à  Alep où nous allons passer 3 nuits dans le même hôtel Boustan. Mansour nous propose de prendre notre repas du soir dans le restaurant des Travailleurs, proche de l'hôtel. le cadre est agréable, tout comme la nourriture, et les prix modiques.

lundi 13: Alep

 J'ai eu une nuit un peu agitée, la "tourista" qui a déjà  frappé plusieurs membres du groupe, sous une forme atténuée il est vrai, semble vouloir m'inquiéter un peu; c'est l'occasion d'essayer le remède local, du jus de grenade très concentré. C'est assez écoeurant, mais se révèle efficace, au moins jusqu'au lendemain. Dans le chapitre des problèmes de santé, on peut noter que le soleil, encore très fort, et l'air très sec, pourraient être à  l'origine de fièvres et de divers légers désagréments respiratoires.

L'hôtel est situé dans le centre-ville, proche du musée national ainsi que du quartier arménien. Immédiatement après le petit déjeuner, nous partons pour le musée pour y être à  l'ouverture, avant l'affluence. L'établissement est essentiellement consacré aux civilisations pré-chrétiennes de la Phénicie (la partie côtière de l'actuelle Syrie) et de la vallée de l'Euphrate. Des statues monumentales très anciennes sont conservées ici.

Du musée, nous remontons vers la citadelle. Cette place forte domine nettement la ville; les premières murailles dateraient du 4ème S av JC. les pillages et les tremblements de terre ont laissé un intérieur dévasté; toutefois on peut visiter une partie du palais royal dont la salle du trône recèle un beau plafond ouvragé.

Après cette visite une partie des femmes du groupe va profiter des services d'un hammam d'Alep, très réputé; nous avons quartier-libre pour le reste de la journée. Alep est une ville, très vivante et très riche culturellement, et je me réjouis de pouvoir y flâner sans contrainte, même si je dois dire et redire que les contraintes de ce  groupe sont minimales et presque totalement effacées par tout ce que nous apporte notre guide,

Près du pied de la citadelle, il est possible de descendre dans les souks, dont la partie la plus haute, contenant tout ce que peut acheter un touriste, est un peu moins conviviale que les autres, où l'on n'est pas soumis aux sollicitations parfois pressantes des rabatteurs d'acheteurs potentiels. Je parcours les différentes artères de ce monde que sont les souks; au passage quelques jeunes pouvant être étudiants m'attirent dans une boutique d'où, après avoir essayé de discuter un peu, et mangé un morceau de pizza syrienne avec eux, je redescends vers l'hôtel; mais avant d'aller me reposer, je passe à  l'office du tourisme, en face du musée visité le matin, pour récupérer cartes et plans, l'accueil y est sympathique.

Aujourd'hui, je ne mange pas à  midi, pour essayer de ne pas réveiller mes ennuis digestifs qui semblent s'être calmés, et je me repose. Dans la deuxième partie de l'après-midi je repars vers les souks pour essayer de voir les différents khans ainsi que la grande mosquée. Cette fois je pénètre par la partie basse, par la porte d'Antioche (Bab Antakia). Une petite remarque à  propos d'Antioche: cette ville et sa région, turques, entre la Méditerranée et le NO de la Syrie, figurent sur les cartes syriennes dans une zone revendiquée par l'état syrien.

Le bas des souks consacrés aux denrées alimentaires périssables, n'est peut-être pas le plus intéressant, mais de là  je me rends à  la grande mosquée dont le minaret est particulièrement incliné, suite aux tremblements de terre. Je pénètre par l'entrée des touristes. la cour est belle, mais malheureusement l'intérieur est en cours de réfection et je repars un peu frustré. En revenant vers la partie touristique des souks, un syrien assez jeune m'aborde; on peut deviner qu'il a des choses à  vendre mais dans un français assez correct me propose seulement de me montrer les khans, qui malheureusement sont presque tous défigurés par leur transformation en entrepôts. Mon guide  me conduit alors vers un bâtiment beaucoup plus impressionnant, l'ancien asile psychiatrique d'Alep. Il est édifiant de rapprocher ses commentaires, très détaillés, de ceux, beaucoup plus officiels, que nous aurons le lendemain de notre guide Mansour, non moins détaillés.

Il y avait  différents types d'enfermement, cellules fermées, aux murs munis d'anneaux, n'ouvrant que par une fenêtre à  barreaux sur une cour au toit ne laissant passer que peu de lumière, cellules aux portes donnant sur une autre cour un peu plus éclairée, et grande cour avec cellules ouvertes dans la journée. Il y a aussi une autre grande cour, avec un péristyle, et une petite scène où étaient donnés des concerts.
Selon Mansour, les trois types de lieux d'enfermement, qui incluaient dans leurs cours respectives une pièce d'eau avec une fontaine, correspondaient aux 3 étapes d'un traitement où le dosage de la lumière,  le bruit de la fontaine puis la musique, étaient associés à  des préparations médicinales.
L'explication de mon guide du jour est beaucoup plus brutale, mais assez vraisemblable, les cellules fermées contenaient, enchaînés, les hommes dangereux. les cellules, avec des portes ouvrant sur la cour pour des promenades limitées, étaient pour les hommes moins dangereux; les femmes étaient ensemble dans le grand espace aux cellules ouvertes.
Mes deux informateurs sont d'accord sur la place de la lumière, des fontaines et de la musique dans les traitements, ainsi que sur le lieu où étaient donnés les concerts.

Avant de partir mon guide me fait offrir une tasse de café, minuscule en taille, mais au contenu très corsé. je laisse l'inévitable bakchich; mon guide affiche alors son véritable rôle, c'est un rabatteur vers les magasins à  touristes; malgré mon insistance sur ma volonté de ne rien acheter, il veut me montrer des tapis et j'accepte d'entrer dans une boutique; un, puis deux, puis trois hommes, parlant de mieux en mieux le français se succèdent pour me montrer des tapis de toutes qualités et de tous pays du Proche et du Moyen Orient, pendant que je sirote mon énième thé de la journée.
Certains tapis, dont un kurde, ma plaisent beaucoup  et mes interlocuteurs l'ont compris, mais ils finissent par admettre que je ne prendrai rien ce soir, toutefois ils espèrent que je repasserai le lendemain, et sans faire attention je donne mon prénom. En sortant le jeune qui m'avait accompagné jusqu'alors tient à  me montrer son magasin de bijoux, et je redescend enfin vers l'hôtel.

La plus jeune -de loin- de notre groupe propose d'aller manger dans le restaurant Beit as-Sissi -recommandé par un guide édité en françai-, dans le quartier arménien. le cadre est assez agréable, ainsi que la nourriture, sans plus.

Avant de rentrer à  l'hôtel, j'accompagne une partie du groupe pour aller boire un grand verre de jus de grenades pressées devant nous, au coin de la rue; c'est délicieux.

mardi 14: Alep, Saint-Siméon

 Après le petit-déjeuner, profitant de quelques heures libres, je décide de visiter le quartier Al Jdeida, qui est le quartier chrétien, où demeurent beaucoup d'arméniens et de maronites et où ont été construites des églises pour les différents cultes chrétiens. La cathédrale maronite ne présente rien d'extraordinaire à  mes yeux, et arrivé pendant une messe, je repars assez rapidement. Je m'attarde beaucoup plus longuement dans la cathédrale arménienne -du 15ème S- où se déroule également un office. Mais ici il y a tout un spectacle surprenant pour un occidental. Ce sont les chants qui me retiennent, et plus particulièrement, une soliste dotée d'une de ces voix étranges de l'est de l'Europe. Je reste jusqu'à  la fin, ce qui me donne l'occasion de regarder de plus près des peintures anciennes sur les murs. J'avais hésité à  pénétrer pendant que les prêtres officiaient, l'entrée se faisant par devant, mais ici les gens circulent et parlent  sans trop se gêner.

En sortant, je parcours les rues et ruelles du quartier; la population de Al Jdeida semble avoir un niveau de vie plus élevé que la moyenne de la ville, et  on peut noter que beaucoup de maisons anciennes ont été restaurées ou sont en train de l'être. L'écriture arménienne est présente dans tout le quartier, en particulier sur les enseignes des magasins: les lettres cyrilliques (forte présence soviétique dans un passé récent) apparaissent également souvent. J'ai remarqué en outre quelques étoiles de David sculptées sur des linteaux de porte; l'une avait été en partie effacée.

Je finis par sortir du quartier, et me perds. Une femme, à  l'accent prononcé, peut-être slave, voyant que j'ai déplié mon plan, me propose de m'aider, en français d'abord, mais son anglais est meilleur. Mes ennuis digestifs semblent avoir repris, j'aurais dû absorber de nouveau du jus de grenade concentré, mais je ne l'ai pas fait. Pourtant j'ai faim et je m'arrête dans une pâtisseries pour acheter de ces délicieux petits gâteaux aux pistaches, je les consomme sur place avec un thé et je rentre à  l'hôtel.

 Aujourd'hui, mardi, est jour de fermeture des musées et des sites, mais Mansour a obtenu que nous puissions nous rendre  au Qala'at Samaan, autrement dit le site des ruines  de l'ensemble qui avait été érigé au 5ème S en l'honneur de Saint Siméon le Stylite. Des murailles et des tours en firent, au 10ème S une forteresse, d'où l'appellation qala'at.

Quatre basiliques forment une croix à  l'intersection de laquelle s'élève un moignon de la colonne sur laquelle Saint Siméon se serait tenu pendant près de 40 ans, élevant peu à  peu le sommet jusqu'à  atteindre 18m.

L'ensemble est très vaste et devait être fort impressionnant au temps de sa splendeur.

Le soleil est déjà  bas lorsque nous partons pour essayer de trouver un petit coin de montagne pour le coucher du soleil, et... l'arak. En ce moment les récoltes du coton, des raisins et des pistaches battent leur plein. Et à  la nuit tombante, sur la route proche, passent des camionnettes chargées d'ouvriers et d'ouvrières. Des gamins qui accompagnent des troupeaux de chèvres restent un moment à  proximité de nous. Il est vrai que le darbouka de Tony, notre chauffeur, et notre groupe d'étrangers, ne peuvent qu'attirer l'attention, attention toujours bienveillante.





Pour la soirée après le repas, Mansour nous a préparé une petite surprise. Dans l'ancien asile psychiatrique que j'avais visité la veille, dont je lui avais parlé, il a fait venir quatre musiciens et chanteurs, une petite troupe de danseurs folkloriques, et deux derviches tourneurs. C'est une bonne compensation suite à  une petite déception que certains d'entre nous avaient eue; car il y a dans le quartier des souks un français, alsacien semble-t-il, qui possède une très belle demeure, dans laquelle il organiserait des concerts; nous étions quelques uns à  le savoir, et nous aurions aimé vérifier les informations; malheureusement l'homme était d'absent d'Alep.

Nous regagnons notre hôtel pour notre troisième et dernière nuit dans cette ville d'Alep où je serais volontiers resté encore un peu.

mercredi 15: Sergiopolis, lac Assad, Halabiyeh, Deir es Zor

 Notre remontée vers le nord-ouest maintenant terminée et nous allons rejoindre l'Euphrate, plus à  l'est pour le descendre.

Notre première arrêt est pour Ar Rasafeh, appelée Sergiopolis par les chrétiens. Sergiopolis était une importante cité, édifiée, au 5ème S dans une steppe désertique, autour du lieu où était vénéré, comme en beaucoup de lieux en Syrie, Saint Serge. Toutefois les premières occupations de cet endroit semblent remonter à  l'époque des grandes civilisations mésopotamiennes.
Les murailles qui entourent le site sont encore debout pour une grande part, mais à  l'intérieur à  l'exception de 3 églises et de citernes, tout est à  dégager et à  fouiller. Les citernes, indispensables pour les réserves d'eau dans cette région quasi désertique, sont très vastes. Les restes des églises sont encore imposants, et dans ce style byzantin déjà  rencontré sur le site de Saint-Siméon.

Après un thé pris à  l'extérieur, nous partons vers l'Euphrate, mais au passage nous nous arrêtons à  Kapka pour acheter quelques provisions pour le repas.

Depuis que nous sommes dans cette région, nous avons pu remarquer de nombreux forages pétroliers.

C'est au bord du lac Assad, vaste retenue sur l'Euphrate que nous nous arrêtons, près d'une petite plage desservie par un café. Quelques membres du groupe se baignent. Malgré quelque légers nuages, le temps continue à  rester beau et chaud; ces quelques heures au bord de l'eau sont appréciées.

Avec le car, nous nous rendons au Qal'at Ja'bar, forteresse autrefois sur un promontoire devenu une île par la mise en eau de la retenue. De là, nous avons une belle vue sur une grande partie du lac Assad. Ce lieu dont fait également partie, la plage de notre repas de midi, est très recherché par les syriens, en particulier le vendredi, jour de repos hebdomadaire en pays musulman.

Nous retraversons l'Euphrate pour retrouver la rive droite, et parcourir une région, où contrairement à  l'ouest du pays, on a parfois l'impression que rien n'a changé depuis des millénaires. L'habitat semble très élémentaire; les vêtements sont très particuliers et malheureusement une photo que je croyais réussie de 3 générations de femmes n'a rien donné; pas ou très peu de véhicules à  moteur. Ces derniers nous les voyons surtout dans les champs. Il y a un contraste frappant entre la richesse des étendues cultivées dans la plaine de l'Euphrate, et la pauvreté apparente des habitants, et de leur habitat. Je ne me satisfais pas de la réponse de notre guide qui questionné à  ce sujet, me répond  que ces personnes sont heureuses dans ce mode de vie, et qu'elles ne veulent pas en changer...
septembre 2012: une fois encore, la partialité de notre guide envers la situation politique et économique a été évidente, et ne peut qu'être rapprochée du reproche de collusion d'une partie des chrétiens syriens avec Bachar al Assad et sa répression sanguinaire.

Alors que le soir tombe, nous quittons le grand axe Alep-Deir es Zor pour nous arrêter à  Halabiyeh à  l'intérieur d'une imposante muraille; nous n'y restons pas longtemps, car malgré l'heure tardive, et la quasi impossibilité de visiter nous devrions prendre un ticket, même en restant au bord de la route qui traverse la citadelle. Nous sortons donc et allons nous installer un moment au bord de  l'Euphrate. Halabiyeh et Zalabiyeh, la ville jumelle de l'autre côté du fleuve, sont 2 places fortes du 3ème S. dûes à  la reine Zénobie de Palmyre, ville pourtant située à  200km, au sud-ouest, à  vol d'oiseau.

La fin du long voyage vers Deir es-Zor se fait dans la nuit, et nous arrivons à  l'hôtel Ragdan. Notre guide nous propose un restaurant au bord de l'Euphrate pour un repas de poisson, en fait du poisson-chat, très gros, pêché dans le fleuve. Peut-être à  cause de mes malaises digestifs, je n'apprécie pas beaucoup. Et puis se passe le seul incident vraiment pénible du voyage. Le membre du groupe qui a plusieurs reprises s'était signalé par des réactions peu conviviales, prend rudement à  partie les serveurs à  cause du manque de fraîcheur des bouteilles de vin. Le reste du groupe est consterné. Nous rentrons à  pied à  l'hôtel.
Nous bénéficions alors d'un petit supplément culturel impromptu. Il y a dans l'hôtel un chanteur traditionnel professionnel irakien venu examiner un élève syrien. Pour le groupe, sur la demande de l'irremplaçable Mansour, ils acceptent l'un après l'autre de nous donner un bel aperçu de leurs talents.

jeudi 16: Deir es Zor, Palmyre

Depuis hier je prends des médicaments, mes collègues ayant terminé le concentré de jus de grenade. Désormais, pratiquement tout le monde a été atteint. Heureusement, une infirmière, membre du groupe, avait prévu ce type de problème, non seulement pour elle, mais aussi pour les autres.
Ce voyage comportait, en principe, une visite aux sites de Doura Europos et Mari, 150 km plus au sud. Les événements en Irak ont bouleversé cette partie du programme. mais il semble que nous n'ayons pas énormément perdu, les deux sites étant peu "lisibles" pour des visiteurs non avertis.
Par contre, nous nous rendons au musée de Deir es-Zor qui contient des pièces trouvées dans la basse vallée syrienne de l'Euphrate, et surtout des reconstitutions d'habitations telles qu'elles ont pu exister dans la région, à  l'époque des civilisations mésopotamiennes. Ce musée semble être le seul élément culturel important de la ville.

Nous prenons la direction de Palmyre qui devrait être, et qui sera, le moment le plus fort du voyage pour la plupart d'entre nous. Nous traversons une steppe où ne pousse pratiquement rien, et où on se demande où mènent ces pistes que l'on voit se perdre au loin sans pour autant mener à  une agglomération visible.

A Palmyre nous descendons à  l'hôtel d'Orient . Je ne vais pas manger avec les autres. je m'achète quelques bananes, susceptibles d'avoir moins d'inconvénients que les mets habituels. Je reste ensuite à  l'hôtel, jusqu'à  l'heure prévue pour une première visite au site antique.
L'importance de l'étendue et la qualité des ruines d'Apamée étaient déjà  impressionnantes; ici non seulement on cherche de nouveaux superlatifs, mais le cadre du site est lui-même exceptionnel. La lumière de l'après-midi, qui commence à  baisser, dore les pierres et la montagne. La forteresse Qala'at ibn Ma'an monte la garde au-dessus des ruines, de même que les hautes tours-tombeaux de la vallée des morts. De l'autre côté, jouxtant le temple de Baal, la palmeraie s'étend, et lorsque de la forteresse nous pourrons admirer tout Palmyre, j'aurai l'impression que la ville moderne s'efface presque devant le site antique et la palmeraie.

Tasmor, la Palmyre des temps anciens, remonte probablement au néolithique; elle est mentionnée sur des tablettes du début du 2ème millénaire av JC. Toutefois c'est au début de l'ère chrétienne qu'elle va connaître ses heures de gloire, en particulier avec la reine Zénobie.

Mansour nous montre toute la partie est du site, temple de Nabô, théâtre, agora, bains et tétrapylon, mais réserve le temple de Bel pour le lendemain. Nous sortons par le temple de Baal-Shamin, et prenons le car pour monter jusqu'à  la forteresse. Nous ne sommes pas tout à  fait seuls, mais comme presque toujours depuis notre arrivée en Syrie, il y a peu de touristes, et de plus Mansour s'ingénie à  nous faire éviter les heures d'affluence; ce soir est une exception, car le coucher de soleil sur les ruines depuis le Qala'at ibn Ma'an, est très réputé. Le ciel est un peu nuageux, mais déjà  le spectacle est grandiose.

Après notre habituel arak, nous redescendons en ville; je décide alors de ne pas dîner. Il me semble que je vais mieux, et je tiens à  me lever de bonne heure le lendemain pour un autre moment important d'un séjour à  Palmyre, le lever du soleil dans les ruines.

vendredi 17: Palmyre

  
Il est un peu plus de 6 heures lorsque Catie, notre animatrice, et moi, partons vers le site situé à  moins de 10 minutes de marche. La température est plutôt fraîche, un vent assez vif descend des montagnes. Seul, un couple est déjà  là ; au moment du lever du soleil, nous ne serons pas plus d'une dizaine sur l'immense espace. Lentement , les pierres exposées à  l'est s'éclairent, mais un peu de brume devant les montagnes retarde l'apparition du disque; en attendant nous nous abritons du vent, tant bien que mal, au pied des colonnes du magnifique tétrapylon. heureusement contrairement à  ce couple venu les bras nus, nous avons des vêtements chauds.

Dès l'apparition des rayons, des couleurs changeantes illuminent les pierres; le réchauffement est vite perceptible; la scène est très belle et le décor en constante évolution.
Après avoir parcouru un peu le site, nous rentrons à  l'hôtel, les yeux emplis de lumière.

Cet hôtel, à  la fois en ville, et près du site, dispose d'une salle de restaurant tout en haut de l'immeuble, et nous prenons le petit-déjeuner face au site qui s'étend à  perte de vue.

Nous partons vers le temple de Bel pour y être dès l'ouverture. Les murs et les constructions encore debout forment une ensemble imposant. De très beaux décors, sculptés, certains portant encore des couleurs, ornent une partie des vestiges.

En escaladant un mur, je peux voir la palmeraie tout près de l'enceinte du temple, un chemin s'enfonce en face de moi au milieu des palmiers-dattiers, des grenadiers et des oliviers. C'est probablement là , dans la palmeraie, que je passerai une partie du temps libre que nous aurons dans la journée.
 
   

La visite de la tour-tombeau de la vallée des morts ouverte au public est très réglementée, et nous nous y rendons en car pour la première admission de la journée. La vallée est visible du site principal, et on aurait pu s'y rendre à  pied, s'il n'y avait eu les contraintes d'horaires de visite. La plupart des tours sont plutôt en mauvais état, mais celle que nous visitons a été particulièrement bien restaurée. On peut constater que même dans la mort la hiérarchie est respectée, les restes des serviteurs étant placés au-dessous de ceux des maîtres; une autre forme de hiérarchie est observable, les maîtres ont leurs fils à  leurs côtés, mais les femmes sont aux pieds et la taille relative qui leur est attribuée, dans les sculptures, ne respecte pas les proportions habituelles. Environ 80 dépouilles mortelles étaient enfermées dans cette tour, dans des cavités individuelles, La tour a été aménagée pour qu'on puisse monter au sommet, qui n'est pas une terrasse, et où il faut faire attention car il n'y a pas de garde-fou. Nous quittons la vallée des morts au moment où les touristes commencent à  affluer, on est vendredi...

Le car dépose ceux qui le souhaitent près du temple de Bel, non loin de la palmeraie. j'entre par le chemin que j'avais aperçu depuis le mur du temple, bientôt suivi par quelques autres membres du groupe. Nous avons à  peine fait quelques pas qu'un syrien veut nous empêcher de continuer, de fait pour que nous allions dans son verger. C'est un peu plus loin que nous acceptons d'entrer dans un autre jardin, invité très sympathiquement par un jeune paysan qui nous offre dattes et grenade. Sa femme très jeune  s'approche avec des enfants. naturellement nous laissons un peu d'argent et repartons, pour nous arrêter presque immédiatement pour observer l'un des noeuds du système complexe de répartition de l'eau, qui circule partout dans la palmeraie. Nous sommes maintenant cinq à  nous enfoncer plus profondément dans la palmeraie. Partout les régimes de dattes pendent des palmiers, les olives sont déjà  belles, quoique immangeables, et les grenades resplendissent. Les vergers sont tous enfermés dans des murettes en plus ou moins bon état.
De loin en loin, des carrefours et des bifurcations contribuent à  nous désorienter. Le soleil tape de plus en plus fort, et nous finissons par revenir vers l'hôtel.
Des membres du groupe sont attablés dans un restaurant et quoique ne souhaitant pas manger, je m'assoie avec eux pour boire un café dans un ambiance fort sympathique.

A l'hôtel, je ne mange, une fois encore, que des bananes; ce soir nous devons aller dans un restaurant tenu par des bédouins; je préfère ne pas décourager le mieux qui semble se manifester, et être en forme pour la soirée.

Après une sieste, je pars dans la ville. En ce jour de repos, les rues sont calmes. En passant près du souk, pour l'unique fois du voyage, j'éprouve un petit peu de méfiance; ce sont 3 hommes, plutôt jeunes, qui cherchent d'abord à  parler avec moi et qui peu à  peu m'éloignent de la rue; l'un d'eux se prétend iranien, mais ne l'est plus tout à  fait lorsque je lui montre que je connais un peu l'Iran, et les laisse là . Je parcours différentes rues; à  un moment on me propose une promenade à  dos de dromadaire, mais je m'éloigne, en revenant vers le quartier de l'hôtel.

Je m'arrête chez un photographe pour acheter une pellicule. Aprèslui avoir dit d'où je viens, il me demande assez sèchement pourquoi je parle anglais si je suis français; mais il se calme rapidement et m'offre un verre de thé; il  se lance alors dans un discours virulent très anti-britannique et très anti-juif. Il ne faut pas oublier qu'ici, l'Irak n'est pas très loin et que la menace américaine est prise au sérieux.

De nouveau dans la rue, j'ai à  peine le temps de faire quelques pas, que je suis invité par un commerçant à  m'arrêter et boire un thé, je refuse, mais un peu plus loin j'accepte la même offre d'un groupe d'hommes en train de discuter assis sur une chaise sur le trottoir. Arrive un syrien assez âgé présenté comme le père de celui qui m'a invité; il se dit ancien combattant des forces françaises; il m'offre une des grenades qu'il a apportées de son jardin. je laisse quelques pièces européennes à  l'enfant qui est là  et qui, dit-il, fait une collection de monnaie. En échange je reçois des pièces datant, m'affirme-t-on, du protectorat français en Syrie mais qui se révéleront avoir une vingtaine d'années au plus; mais peu importe j'ai passé un moment agréable.

Je rentre à  l'hôtel tout proche, et peu après le groupe repart pour un nouveau coucher de soleil sur la colline de la forteresse. Nous y retrouvons les vendeurs de tissus, cartes postales et autres souvenirs, déjà  rencontrés partout où nous sommes allés. Tout le monde s'amuse à  marchander un peu, et finalement presque tous achètent quelque chose. Aujourd'hui le coucher de soleil bénéficie d'un ciel dégagé et le spectacle est très beau. Ce coucher de soleil me vaut aussi la photo-surprise de ce marchand ambulant syrien qui, sans s'en rendre compte, s'est planté devant mon objectif au moment où j'appuyais sur le déclencheur.

Le repas du soir est prévu dans un restaurant tenu par des bédouins. Sur la terrasse une tente a été reconstituée, avec toiles et piquets, tapis, coussins et tentures.. Quelques selles de dromadaires permettent de soulager les reins de ceux qui ne peuvent pas s'appuyer contre un mur, car nous mangeons au ras du sol. Après les mezzés habituels, nous avons le plaisir de déguster un mensaf, agneau rôti présenté avec du riz et divers ingrédients très goûteux. L'agneau est découpé devant nous -voir la photo ci-contre-.

Une fois encore, avec mes voisines de la soirée, nous faisons venir un narghileh, que nous fumons tout en sirotant café et thé. Un des jeunes vendeurs déjà  rencontrés dans la journée, vient nous rejoindre et arrive encore à  placer quelques grands foulards. Comme nombre d'habitants de Palmyre, et comme certains kabyles que nous connaissons en France, c'est un rouquin à  la peau claire qu'on ne peut que remarquer parmi les syriens généralement plus bruns les uns que les autres.

Alors que nous avons payé, et que nous nous apprêtons à  sortir, quelqu'un se met à  chanter, peut-être Tony notre chauffeur, et de nouveau, avec les personnes présentes dans le restaurant, chants et darbouka accompagnent les danses. Mais c'est vendredi, le jour de Dieu, et il n'est pas possible de continuer longtemps.

samedi 18: Palmyre, Bagdad Café, Marmoussa, Damas

Début de journée à  travers la steppe; le désert est tout près; si les zones très arides couvrent une grande partie du territoire syrien, le désert ne concerne qu'une petite partie du sud-est, frontalière avec l'Irak et la Jordanie. Parfois nous apercevons quelque oasis. Il nous arrive de longer une voie ferrée. Mais à  part quelques rares tentes de bédouins, il n' y a personne, ni dans la campagne, ni sur ce qui est appelé autoroute, mais qui n'est qu'un axe routier avec un revêtement en bon état reliant Damas à  Bagdad.
La notion d'intersection  d'autoroute est ici tout à  fait différente de ce que l'on connaît dans les pays occidentaux: au croisement, qui se fait à  niveau, est installé un poste de police; pour obliger les voyageurs à  ralentir considérablement, des "gendarmes couchés" très secs  ont été installés dans chaque direction à  quelques dizaines de mètres du croisement, tout cela en pleine steppe.

  

  
A propos de Bagdad, une surprise nous attend: Bagdad Café! Comme dans le film, du même nom, qui se passe aux Etats-Unis, au milieu de nulle part, il existe un Bagdad-Café syrien, qui, de plus, prétend à  l'antériorité de l'appellation!
Il y a là  une habitation de bédouins sédentarisés -un peu dans le style des villages-ruches que nous avons vus à  l'est de Hama-, quelques tentes et l'actuel Bagdad-Café, une construction en parpaings, d'intérieur beaucoup plus agréable que l'extérieur. Sur le "parking", deux 4x4 sont garés. En principe les grands cars ne doivent pas s'arrêter, le nôtre -25 places- ne semble pas poser problème.

Nous buvons un verre de thé, faisons quelques emplettes; comment résister à  la tentation d'acheter un T-shirt estampillé "Bagdad-Café"? Arrive un syrien avec un instrument bricolé à  partir d'un bidon d'huile de table de 5 litres, un morceau de branche d'arbre et 2 cordes; le surprenant c'est que le son est presque aussi bon que celui de l'instrument qu'il veut imiter, et le joueur semble vraiment doué. Inévitablement, notre chauffeur se met de la partie et le groupe le suit, une des femmes de notre groupe danse, d'ailleurs fort bien, pour notre plaisir et celui des syriens présents.

  Nous ne pouvons pas nous attarder trop longtemps, car une petite montée à  pied de 150 à  200m de dénivelé nous attend, sous un soleil vraiment chaud. Après être passé à  côté de très grandes mines de phosphates à  ciel ouvert, nous quittons la grande route pour les contreforts des montagnes, nous longeons de grands terrains militaires, et stoppons au-dessous du couvent de Marmoussa.

Nettement au-dessus de nous, le couvent et ses annexes semblent verrouiller l'entrée de gorges. Un chemin muletier, avec de larges marches, comme ceux que l'on peut voir dans les îles grecques, s'élève à  flanc de montagne. Comme prévu nous transpirons un peu en arrivant sur la terrasse ombragée, où un thé nous est immédiatement servi.

août 2012: le supérieur du couvent de Marmoussa a été expulsé de Syrie.

Le couvent de Marmoussa mérite notre attention à  plusieurs titres. Déjà , le chemin d'accès permet de jouir de la beauté du site. 
Le monastère fut fondé au 6ème S, à  l'époque byzantine,  par un éthiopien; il fut florissant jusqu'au 16ème S et abandonné au 19ème. Un prêtre italien, l'actuel supérieur, séduit par le lieu, décida, il y a une vingtaine d'années, de restaurer l'ensemble et de fonder une communauté chrétienne inter-confessionnelle, où de fait se retrouvent des membres des communautés syriaques(romaines) et orthodoxes syrienne; toutefois les ambitions oecuméniques vont bien au-delà  de ces deux communautés, et des liens solides existent en particulier avec les communautés musulmanes. Le monastère et ses occupants sont très insérés dans le milieu régional; nous avons pu voir l'énergique supérieur en grande discussion avec des autorités locales au sujet de l'aménagement de la région.
Une autre particularité est l'hospitalité généreuse réservée aux visiteurs qui veulent rester quelque temps, auxquels n'est demandé qu'une participation aux petits travaux.
Enfin, les bâtiments contiennent de magnifiques fresques dans l'église désormais restaurée.

  Nous mangeons les provisions achetées à  Palmyre. Je vais faire un tour dans la montagne; les gorges qui s'ouvrent derrière le couvent, sont une invitation à  la randonnée. Mais nous devons repartir pour la dernière étape de notre voyage, le retour à  Damas, où il est prévu que nous visitions le musée national.

  Notre visite est assez rapide, d'une part parce que nous arrivons à  peine un peu plus d'une heure avant la fermeture, d'autre part parce que Mansour est en proie à  un mauvais rhume, et enfin et surtout parce que le prince héritier espagnol est en visite à  Damas, avec sa fiancée et toute la section pré-chrétienne du musée est fermée pour cause de préparation de la visite princière...

Il est vrai que nous n'aurions pas vu beaucoup plus que ce que nous avons vu, jusqu'à  présent, un peu partout dans le pays. A l'extérieur nous pouvons  contempler la lumière de fin d'après-midi sur le dôme et les minarets de la mosquée Takyyia as-Suleyman.

Aujourd'hui -la fatigue du voyage dont la fin approche?-, nous n'arrivons pas respecter les horaires que nous nous sommes donnés, et nous arrivons trop tard en haut de la colline d'où nous devions admirer le coucher de soleil sur la chaîne de l'Anti-Liban. Néanmoins, nous buvons notre dernier arak avec, au-dessous de nous, la ville de Damas qui peu à  peu prend son aspect nocturne, avec ses dizaines de mosquée illuminées en vert, couleur de l'islam. Dernière soirée avec notre chauffeur dont la gentillesse et l'attention nous ont tous touchés; pour la dernière fois il sort son darbouka, et se met à  chanter.

 Nous redescendons vers la ville et nous retrouvons l'hôtel de notre arrivée. Pour notre repas du soir, nous nous rendons à  pied dans un restaurant à  quelques minutes de l'hôtel.

dimanche 19: Damas

Dernière journée, à  Damas; journée libre pour ceux qui ont envie de compléter leurs emplettes, ou de parfaire leur connaissance de la ville. je me rends en premier  chez un disquaire recommandé par le guide Lonely Planet; facile à  localiser sur l'avenue Sharia-Bur Said, sur la gauche, un peu avant sur la place Saahat Youssef al-Azmeh; le disquaire est sympathique, vous fait écouter mille disques, et vous propose des "copies" pour 1/5 du prix des originaux. Outre que je n'aime pas beaucoup le piratage, les copies que j'ai entendues étaient enregistrées sur une seule plage, interdisant l'écoute morceau par morceau.

J'avais pensé prendre quelques livres en français sur la Syrie, dans la librairie Avicenne, dans le même quartier que le disquaire, mais en retrait par rapport à  l'avenue, et en face d'un lycée, rue Tajhiz. Le choix est intéressant, mais les livres, au moins ceux qui me plaisent, sont importés et donc chers. Je trouverai aussi bien en France, avec les inconvénients de l'encombrement et du poids en moins.

Ayant fait le tour des souvenirs culturels, je me dirige vers les souks. Les pistaches de Syrie sont vraiment bonnes, et je m'en fais servir un kilo; au moment où je m'éloigne, j'aperçois Catie, notre animatrice, et un couple du groupe dans une boutique de l'autre côté de l'allée; en les rejoignant, je vois qu'ici comme en Grèce on vend une sorte de pâte d'abricot, en plaques très fines, que j'apprécie beaucoup, et je me laisse tenter. Je quitte mes amis, et revient vers la partie plus touristique des souks où se trouve la boutique Tony&Stephan recommandée à  la fois par le guide Lonely Planet et par Mansour, notre Cicérone; ce dernier nous a toutefois averti: la qualité est très bonne mais les prix sont élevés et on ne marchande pas. J'en ressors avec le portefeuille un peu plus léger et content de mes achats. Je commence à  avoir faim et je vais acheter un shawerma. Mes emplettes commençant à  m'encombrer, je rentre à  l'hôtel où je me repose un peu.

  Un peu plus tard, je décide d'aller errer un peu dans la ville et je commence par le quartier de la mosquée Takyyia as-Suleymaniyya; une ancienne madrassa (école coranique) près de la mosquée a été réaménagée et accueille des boutiques d'artisanat tout autour de la cour. Au moment où je me déchausse pour entrer dans la mosquée un homme assez jeune me dit, en français, qu'il regrette mais que je n'ai pas le droit d'entrer. Il s'agit d'un algérien venu étudier dans la madrassa actuelle. En Iran, j'avais déjà  été un peu désorienté par ces autorisations/interdictions d'entrée qui varient d'une mosquée à  l'autre, et qui semblent dépendre du bon vouloir des personnes se trouvant là  au moment où vous arrivez.

Je reste encore un grand moment dans la cour, très agréable, puis après avoir acheté deux enveloppes de coussin dans une des boutiques, je pars pour un quartier relativement éloigné, où s'étend le souk Saroujah, ou plutôt où s'étendait, car le quartier est en complète rénovation, et du souk il ne reste que quelques boutiques et beaucoup de maisons à  moitié, ou entièrement démolies. Certaines de ces maisons ont dû être très belles, si j'en juge par les colonnes et les moucharabiehs encore visibles. Une nouvelle fois en Syrie, dans ce quartier très populaire, je parcours des ruelles où je ne ressens aucune insécurité, où je ne croise aucun regard hostile, où je vois des femmes pas plus couvertes que dans une ville occidentale, côtoyant d'autres entièrement dissimulées, y compris les yeux, derrière des voiles noirs.
Je croise un jeune cireur de souliers qui veut cirer mes chaussures en gortex, mais je le décourage, et puis il me montre un homme dans une voiture, en me disant "police"; au regard de l'homme qui a entendu, je pense que c'est certainement vrai, mais il ne réagit pas davantage; l'enfant s'en va, puis je me ravise, le rappelle et lui donne ce que je lui aurais donné s'il avait pu faire son travail avec mes chaussures.

Je repars vers la citadelle, et parcours un souk où je ne m'étais pas encore rendu; souk très populaire avec toutes sortes d'artisans. Je ne me lasse pas de parcourir les multiples artères qui définissent ce monde laborieux, puis j'ai envie de m'asseoir et je vais boire thé, puis café, sur la terrasse du café An-Nafura. L'ambiance du lieu est vraiment agréable.

Avant de rentrer à  l'hôtel, il me reste encore un achat à  faire; je ne veux pas repartir sans ces petits gâteaux fourrés de pistaches. C'est sur la place des Martyrs (Shoadah), à  mi-chemin entre notre hôtel et la citadelle, que sont installés, semble-t-il les meilleurs pâtissiers de Damas pour ce genre de production. Effectivement, tout est très appétissant, et je repars avec deux grosses boîtes.

C'est notre dernière soirée, et nous buvons notre dernier arak tous ensemble avec Mansour; nous en profitons pour revenir sur nos deux semaines syriennes. Visiblement notre animatrice et notre guide sont aussi satisfaits que la majeure partie du groupe.

  Notre dernier repas a lieu dans une sorte de restaurant-cabaret, l'établissement Alezz situé dans les souks. Le cadre est pittoresque, et il est dommage que je ne comprenne pas l'arabe, visiblement tout le monde s'amuse beaucoup d'un des artistes. Il y a même un derviche tourneur, ce qui est encore plus surprenant qu'à  Alep étant donné le caractère, en principe, religieux de la danse des derviches. La nourriture est délicieuse et abondante. En face de nous sont installés deux jeunes couples syriens, musulmans si l'on en juge par les vêtements des femmes; ils ont un bébé avec eux; avec leur permission donnée visiblement avec plaisir, je prends quelques photos, dont des tirages sont maintenant là -bas. Malheureusement, nous ne pouvons pas communiquer, sauf pendant quelques minutes, grâce à  Mansour pour que je puisse récupérer une adresse où envoyer les photos. Dernier narguilé, dernier café et c'est le retour à  l'hôtel pour... 2 heures de sommeil!

lundi 20: Damas-Lyon

Deux heures trente du matin, il est temps de se réveiller! Le car nous attend pour le dernier voyage, et Tony range nos bagages. A  3h30 nous sommes à  l'aéroport, pour un départ à  5h30.
Nous sommes en début de matinée à  l'aéroport d'Istanbul, où nous avons une longue attente pour la correspondance. Le groupe s'est plus ou moins dispersé; alors que je me suis installé seul à  une table pour boire un café, Catie notre animatrice, vient me rejoindre et entame avec moi une longue discussion sur le séjour en Syrie.

Comme prévu, nous sommes à  Lyon peu après 15h; je récupère ma voiture au parking de l'aéroport et je rentre à  Bourdeaux.



Le groupe

Dans ses brochures, ARVEL, l'association organisatrice du voyage, annonce clairement son intérêt pour le tourisme solidaire, ainsi que sa volonté de promouvoir un tourisme où contacts humains et découverte culturelle priment sur consommation et divertissements; la composition du groupe, et surtout l'ouverture d'esprit, s'en ressentent, positivement à  mon avis.
Le séjour se faisant en dehors des congés scolaires, les membres de l'Education Nationale, sont absents. Participent au voyage des cadres moyens, des employés de bureaux, des travailleurs sociaux et  des retraités dont je suis,
L'âge moyen semble être d'environ 50-55ans; la plus jeune, fille d'une autre participante a moins de 30 ans et le plus âgé est un retraité -à  peu près 65 ans-.
Comme toujours dans ce genre de groupe, il y a nettement plus de femmes -10- que d'hommes -5- et les solitaires sont peu nombreux; on trouve 4 couples, 3 femmes d'une même famille, deux femmes d'une même entreprise, une femme venue seule, et moi-même,.

Tout au long du voyage, une grande volonté  de faciliter le fonctionnement du groupe s'est manifestée; les consensus ont généralement été faciles à  obtenir, que ce soit pour le choix des horaires, pour les rares changements de programmes, ou pour le choix d'activités optionnelles. Les petits problèmes de santé ont été facilement réglés, en particulier grâce à  l'infirmière du groupe, dont les compétences et la pharmacie ont été mises à  l'épreuve. Seul, un des participants a réussi à se fâcher avec la plupart des autres.
La convivialité a été presque toujours de mise, mais on ne peut pas dire que le groupe ait été particulièrement chaleureux. Personnellement, depuis le retour, j'ai eu avec plaisir des contacts avec plusieurs personnes.

Organisation

L'association organisatrice du voyage est ARVEL (Association, Rencontres, Voyages, Etudes, Loisirs). Elle est domiciliée dans la banlieue lyonnaise, à  Villeurbanne.

ARVEL propose plusieurs formules; le voyage en Syrie est classé dans la catégorie "voyage-expédition", mais de fait, même si le contact avec la vie locale est important, le degré d'organisation l'apparente plutôt à  "voyage-découverte".


Formalités
: Il fallait un visa, valable 15 jours, gratuit, qui pouvait être obtenu sur place. ARVEL s'est chargé d'une demande collective, et l'entrée et la sortie se sont passées sans problème, accélérées il est vrai par la présence de notre guide local.

Transport
: Aller et Retour entre Lyon et Damas ont été effectués sur Turkish Air Lines, via Istanbul. Pour chaque vol, y compris à  5h du matin entre Damas et Istanbul, nous avons eu un repas complet.
Sur place tous les déplacements collectifs, y compris les trajets urbains non effectués à  pied, ont utilisé un petit car, climatisé, de 25 places, donc très largement suffisant pour notre groupe et l'accompagnement.  


Accompagnement
: Il se composait de l'animatrice ARVEL Catie, du guide local Mansour et de Tony le chauffeur du car. Il était difficile de souhaiter mieux, l'entente entre les trois, et la compétence de chacun dans son domaine, ayant été exemplaires. Les trois nous ont apportés l'attention, efficace mais discrète, requise par un groupe de personnes habituées à  voyager. Il a été très agréable de constater la constante et sympathique disponibilité de l'accompagnement, tout en ayant la réelle possibilité de s'éloigner, ponctuellement, du groupe pour ceux qui le souhaitaient.
Un autre point positif a été le rythme, presque toujours assez soutenu, mais jamais épuisant; la répartition  des visites et des trajets était également optimale, les grands déplacements dans le nord-est du pays n'intervenant qu'après les nombreux arrêts du début, dans l'ouest. Le souci de nous faire bénéficier des meilleures conditions climatiques -il faisait encore très chaud dans la journée- et de luminosité -pour les photos- était remarquable.

Un dernier point, qui était un plus par rapport à  ce qui était annoncé: les attention dont Tony, le chauffeur, nous a fait bénéficier, comme le thé au retour au car de visites sur site, ou l'ambiance qu'il créait avec son darbouka et ses chants, bien aidé il est vrai par Mansour.

La présence de Mansour, ancien professeur de français nous a grandement facilité les contacts avec nos divers interlocuteurs. Parmi la population de notre âge, il était possible de trouver des personnes parlant français, souvent très correctement; mais comme partout, hors des pays francophones, l'anglais est la langue étrangère la plus connue et la plus utilisée, en tout cas par les commerçants et par les jeunes générations dans leur ensemble.


Hébergement: Sur les 15 nuits du séjour, 13 se sont passées à  l'hôtel, 1 chez l'habitant, et 1 dans un centre pour séminaires et congrès.
Les chambres des hôtels, toujours propres et avec au moins une douche individuelle, ont présenté des degrés de confort divers de simple à  moyen, avec climatisation (presque toujours). L'accueil était toujours agréable. les petits déjeuners, toujours compris dans la nuitée étaient copieux avec thé/café beurre, fromage, oeufs durs, confiture, parfois crudités (Deir es Zor).

La nuit dans le centre pour séminaires d'un couvent de Sednaya a été particulièrement confortable dans des chambres récentes, avec l'accès à  une grande terrasse ouvrant sur un beau panorama.

Le confort de notre unique nuit chez des bédouins sédentarisés était beaucoup plus rudimentaire, mais tout à  fait acceptable. Personnellement, j'ai beaucoup apprécié cette possibilité d'approcher, un peu, la vie des locaux.


Nourriture
: Seuls étaient compris dans le forfait ARVEL, les petits déjeuners -cf. le paragraphe hébergement, ci-dessus-. Pour le repas de la mi-journée, l'emploi du temps prévoyait presque toujours d'être dans une localité où nous pouvions soit acheter les productions des fours locaux, friands, petites pizzas, shawermas, etc..., soit prendre un repas dans un restaurant. Il n'y avait aucune incitation à  suivre le groupe, mais les suggestions de Mansour furent toujours les bienvenues.
De même, presque chaque soir nous avons suivi les conseils de Mansour, ce qui nous a permis de connaître des lieux et des spécialités qui nous auraient probablement échappé.


Activités culturelles
: Le programme s'est révélé dense, varié et très intéressant.
Toutefois j'ai eu l'impression que dans le domaine religieux, les parts réservées respectivement aux confessions chrétiennes d'une part, et aux obédiences musulmanes d'autre part ne respectaient pas vraiment la répartition réelle. Par ailleurs, la partie concernant les juifs s'est réduite aux belles fresques  transportées de l'antique synagogue de Doura Europos, dans le musée national de Damas.

Il est vrai que deux semaines ne peuvent que donner un aperçu de la richesse du patrimoine culturel syrien, et nos accompagnateurs ont forcément dû faire des choix.

En dehors des visites des sites, grands et petits, nous avons pu approcher les activités locales, comme l'élaboration de l'arak, le cueillette des pistaches, ou la fabrication d'objets recouverts de marqueterie. Nous avons pu assister à  un spectacle de musiques  et danses locales, dans un cadre unique.


Transports locaux

Nous n'avons jamais utilisé les transports locaux. Il semble que l'ensemble des localités du pays soit desservi régulièrement soit par autocar pour les grands trajets, soit par microbus pour les dessertes locales. Les trains ne semblent pas très pratiques.

Hygiène, Santé

Le problème récurrent ici pour les occidentaux est, comme dans beaucoup de pays manquant d'eau potable, la "tourista". Il existe un remède local, efficace à  condition de le prendre suffisamment longtemps, c'est un concentré de jus de grenades assez écoeurant, mais la pharmacopée naturelle ne produit pas que des apéritifs!
Toutefois il est recommandé d'avoir avec soi un anti-diarréhique (ex:Tiorfan), un désinfectant intestinal (ex:Ercéfuryl) et une aide à  la réhydratation (ex:SMECTA)



Nourriture/Boissons



les mezze

Entrées incontournables et pouvant suffire pour un repas en raison des quantités et de la variété. Ce sont toutes sortes de salades et préparation à  base de légumes (taboulé, crème de pois chiches, caviar d'aubergine etc...) ainsi que des friands, pizzas, ou d'autres préparations passées au four.

la pâtisserie

Il s'agit probablement d'une des meilleures du pourtour méditerranéen. Les magasins spécialisés se trouvent un peu partout, mais à  Damas la place des Martyrs (Shoadah) accueille les meilleurs de la ville.

la bière

Pas terrible la bière locale, mais on ne va pas en Syrie pour boire de la bière, et on peut toujours essayer la bière libanaise.


café An-Nafura, Damas

A proximité d'une des entrées de la mosquée des Omeyades et des souks, ce café de Damas mérite que l'on y passe quelques heures. Naturellement, on y trouve des touristes, mais les clients locaux sont bien présents.  Les affamés trouveront shawermas, brochettes et autres gourmandises dans les boutiques du souk  dont l'entrée est à  quelques mètres.

restaurant de la Table Ronde, Krak des Chevaliers

Très bon accueil dans le restaurant de ce village druze; nous avons pu boire un bon vin et grâce au personnel du restaurant nous avons été invité à  une fête de mariage, sous les murailles du krak.


restaurant des Travailleurs, Alep

Encore une bonne adresse proposée par Mansour. le repas est bon, copieux, pas cher, dans un cadre agréable.


restaurant des Quatre Norias, Hama

Quoique nous ayons mangé une spécialité, le souvenir que j'ai du cadre avec les quatre norias illuminées est ce qui m'a le plus marqué


Documentation
guides
Lonely Planet Syrie
Guide Bleu Syrie
documents du Ministère du Tourisme de Syrie (excellents documents distribués par les bureaux de Damas et d'Alep)
cartes
dépliants divers